jeudi 26 novembre 2009

point de vue : Si cas triste

Chaque fois c'était la même chose, l'été venu elle me sortait, là, à la vue de tous, baignée de soleil ma blancheur semblait tâcher sa peau. Elle me détestait plus encore que les 5 autres. Je me détestais alors en ces beaux jours.

Je dis "je", je suis celle qui ose le plus me dire, les 5 autres pareilles à moi, là le long de ses tibias, tout autour de ses rotules, sont trop bien rangées pour cela. Je suis l'erreur des 6. Nous devions être 4. A l'hôpital ils ont changé d'avis, sans visas d'autorisation de traverser plus les frontières de peau. Elle a tout entendu, mais ses jambes engourdies n'ont pas pu contester. J'ai senti un frisson parcourir son dos.


Nous ne témoignons pas d'un accident sensationnel ou d'une horreur particulière. Nous sommes venues là, sur son monde à elle, posées dans ses reliefs féminins uniquement pour qu'un homme puisse traverser sa peau, entrer et réparer. Nous sommes la fermeture des ouvertures. Nous sommes les stores occultant des fenêtres ouvertes sur ses rotules. Nous sommes apparues au moment même de la condamnation des brèches. Nous sommes le liant de ses peaux remises en contact. Nous sommes les symboles d'une désunion réunie, réunification des peaux. Mais nous sommes surtout sa honte. Je suis la plus moche, celle qui a le moins fondu sur elle. Elle me cache plus que les autres, c'est évident!

Zaïa, ma symétrique en mieux tracée ne veut pas m'écouter lorsque je lui parle de ce sentiment là, celui d'être de trop. Elle est plus philosophe
:
-"Tu ne comprends donc pas! Tu ne vois donc pas! Nous sommes au contraire les deux plus importantes, celles qui n'étaient pas prévues, mais aussi les indispensables, celles qui, dans le chaos du chantier, sont apparues en toute urgence. Nous sommes sur ses genoux : nous sommes le "je" et le "nous"."